les démo

Le mouvement "Démocratie pour le Pays Basque", dont les membres s'appellent les Démo, est né avec l'an 2000 dans un contexte que de plus en plus de personnes percevaient comme un déni de démocratie pour le Pays Basque Nord (partie du Pays Basque située dans l'Etat français au sud de l'Adour).

En effet, depuis quelques années, des revendications politiques sont portées par la majorité de la société du Pays Basque Nord, mais ne sont pas écoutées par les pouvoirs publics, et encore moins mises en application. Ces revendications sont:

- la mise en route par les pouvoirs publics d'une politique linguistique efficace en faveur du développement de l'enseignement et de l'usage de la langue basque.

- la mise en place d'une institution politique à l'échelle du Pays Basque Nord par la création d'un Département Pays Basque, réclamée par la majorité de la population du Pays Basque Nord.

- le respect des droits des prisonniers politiques basques, notamment leur rapprochement dans des prisons proches de leur domicile (ils sont actuellement dispersés dans des prisons françaises et espagnoles à des centaines de kilomètres de leur famille), droits normalement garantis par les lois en vigueur en France et en Espagne, la législation européenne et les conventions internationales.

Face à la non application de ces revendications légitimes, un petit groupe de militants s'est constitué, considérant que de tous les moyens de pression dont peut disposer un mouvement politique revendicatif, il en restait un qui n'avait pas encore été véritablement creusé jusqu'alors en Pays Basque Nord: la non-violence active.

Sur les modèles de Gandhi, Martin Luther-King, César Chavez, ou plus près de chez nous la Confédération Paysanne, Greenpeace, mais aussi les nombreuses luttes sectorielles menées à ce jour au Pays Basque pour la langue basque, l'agriculture paysanne, l'écologie, l'insoumission au service militaire... notre activité consiste à réaliser des actions symboliques et aussi spectaculaires que possible, de manière à attirer l'attention de la population sur les injustices qui nous touchent, mais sans user de violence physique ou verbale envers quiconque.

Quelques militants ont donc mis en marche ce mouvement, réalisant quelques actions spectaculaires, rejoints sans cesse par de nouveaux arrivants. A ce jour, nous avons réalisé des dizaines d'actions.

Nous en citerons tout d'abord 4, qui sont à l'image de notre dynamique et qui, par les communiqués de presse distribués lors de leur réalisation, explicitent un peu plus nos revendications.

 

Le 14 mars 2000
26 Démo rentrent au Conseil Général du Département des Pyrénées-Atlantiques (celui-ci renferme le Béarn et le Pays Basque Nord) à Pau, et ressortent avec les 21 sièges des conseillers généraux du Pays Basque (les sièges ne réapparaîtront que le 31 mars suivant au Pays Basque, à Bayonne, dans une ambiance de réception d'ambassade revendiquant la création d'un Département Pays Basque).

Communiqué:

" Nous sommes venus au Parlement de Navarre de Pau pour reprendre notre dû. En effet, les 21 sièges des conseillers généraux du Pays Basque n'ont rien à faire au Conseil Général de Pau, où ils trônent, minoritairement, au sein d'une institution dont la société basque ne veut pas. Cette dernière a clairement démontré son attachement majoritaire à la revendication d'un département Pays Basque.

En effet :

-64% des maires du Pays Basque ont voté pour.
-85 conseils municipaux sur 159 ont délibéré pour.
-6000 personnes le 30 janvier 99 et 12 000 le 9 octobre ont manifesté pour.
-la population du Pays Basque s'est prononcée pour, lors de 2 sondages successifs ( 66% des avis exprimés favorables ).

Le Conseil Général se doit aujourd'hui de respecter cette volonté, majoritairement et démocratiquement exprimée, de la population du Pays Basque. Il doit voter la partition de l'actuel département en un département Béarn et un département Pays Basque.
Nous avons donc décidé de rapatrier au Pays Basque les sièges de nos 21 conseillers généraux. C'est le premier pas vers la création d'un Conseil Général du Pays Basque. Nos élus ont d'ores et déjà de quoi siéger en Pays Basque ".

 

 

Le 27 décembre 2000
4 Démo simulent un accident de la route en retournant une voiture et en s'allongeant dans une marre de peinture rouge répandue sur le sol devant la prison de la Santé à Paris, pour dénoncer une des conséquences de l'éloignement des prisonniers politiques basques: les accidents de la route dont sont victimes les familles des prisonniers à force de réaliser des milliers de kilomètres pour se rendre aux prisons très éloignées du Pays Basque.

Communiqué :

" L'effroyable accident de la route que vous avez sous vos yeux est, rassurez-vous, purement factice. Il s'agit d'une mise en scène destinée à faire connaître et dénoncer la politique d'éloignement et de dispersion des prisonniers politiques basques, qui provoque, elle, des accidents bien réels. Songez que les parents ou amis d'un prisonnier basque doivent parcourir en moyenne 1600 km aller-retour pour 30 minutes de visite; or la dispersion géographique de ces prisonniers (actuellement sur 28 prisons différentes) empêche les familles de pouvoir organiser un autobus commun, et les oblige à faire le trajet par leurs propres moyens. Le résultat se passe de commentaires: déjà 8 morts et des dizaines de blessés parmi les parents de prisonniers revenant de visite...

L'engagement des prisonniers basques peut être diversement apprécié, mais la politique d'éloignement et de dispersion est incontestablement injuste pour leur famille et leurs proches. (…).

Aussi exigeons-nous, comme l'exigent la population du Pays Basque et la Loi elle-même, que soient respectés les droits des prisonniers politiques basques comme ceux de l'ensemble des prisonniers. "

 

Le 16 janvier 2002
alors que Jean Pierre Chevènement, candidat à la présidence de la république, est en visite à Bayonne, 3 Démo lui offrent une encyclopédie écrite en langue basque.

Communiqué :

" "La langue basque est un obstacle à la propagation des lumières" (Abbé Grégoire, XVIIIè siècle).

C'est avec tristesse que nous constatons que l'idéologie de l'Abbé Grégoire est toujours vivante. L'Etat français continue de nos jours à nier la langue basque et à empêcher celle-ci de se développer dans toutes les activités modernes, condamnant l'une des plus vieilles langues d'Europe à disparaître du Patrimoine Commun de l'Humanité.
En venant aujourd'hui à la rencontre de M. Chevènement, nous voulons nous adresser à tous ceux qui perpétuent de nos jours cette idéologie archaïque. Nous venons leur offrir une Encyclopédie écrite en langue basque, pour leur faire comprendre qu'aucune langue n'est supérieure à une autre langue, que toutes ont le même droit d'existence.

Pour que la langue basque puisse exister, nous exigeons qu'elle soit officialisée, c'est-à-dire qu'elle soit dotée du même statut juridique que celui que possède la langue française. Pour cela, nous demandons à l'actuel ou au futur gouvernement de proposer un projet de loi qui va officialiser les langues "régionales" ou minorisées de France.
Officialiser ces langues ce n'est pas affirmer la différence du droit, mais bien le droit à l'égalité pour toutes les langues "régionales" en France. Autrement dit, il s'agit d'établir l'égalité dans le respect de la pluralité et de la diversité, pour ne pas perpétuer l'inégalité dans l'unicité et l'uniformité.

En Europe, de nombreux Etats ont fait depuis longtemps ce pas: 5 langues nationales ou régionales sont officielles en Espagne, 4 en Italie (dont le français du Val d'Aoste), au Danemark et en Suisse, 3 au Luxembourg, en Slovénie et en Belgique, 2 en Allemagne, au Royaume Uni et en Irlande. Mais en France, une seule langue officielle, le français!
Au Québec on défend à juste titre la langue française face à la domination anglophone, mais en France c'est la langue française qui est un instrument de marginalisation des autres langues et qui menace de disparition les langues basque, bretonne, corse, occitane...

Il est grand temps de stopper ce génocide culturel! Nous sommes convaincus que Diderot, d'Alembert, Voltaire, Montesquieu et Rousseau l'exigeraient! (…). "

 


Le 4 janvier 2002

le FDLM (Front Démo de Libération des Mariannes) nouvellement constitué dérobe trois bustes de Marianne dans trois mairies du Pays Basque Nord.

Communiqué :

" Nous, commandos du FDLM, revendiquons l'action qui a abouti aujourd'hui à la libérationsimultanée de Mariannes en trois endroits du Pays Basque Nord:
Mauléon (commando René Cassin),
St-Jean-Pied-de-Port (commando Rigoberta Menchu) et
Ustaritz (commando Dominique-Joseph Garat).
Trois communes représentatives d'autant de provinces dans lesquelles Marianne ne pouvait que constater, impuissante, tout ce que l'on pouvait faire en son nom, au nom de la République.

La République, concept universaliste et progressiste, issu des Lumières du XVIIIème siècle qui prétendaient éclairer le monde. Une République qui voyait le peuple refuser la domination du monarque, proclamer qu'il était seul souverain en générant une société nouvelle rejetant les privilèges, pour proclamer l'égalité devant la loi de tous les citoyens. L'aboutissement d'un long effort de l'humanité, de Platon à Rousseau en passant par Paoli ou Washington, pour assurer l'épanouissement de l'individu collectif qu'est l'ensemble des citoyens. Mais en lieu et place de ces beaux principes, c'est tout son message que Marianne a vu dévoyé.

Quelle liberté, quelle souveraineté du peuple lorsque le principe de la majorité cesse d'avoir cours selon que l'on se situe au nord ou au sud de l'Adour?

Marianne a vu les élus de ce pays se positionner majoritairement en faveur d'un département Pays Basque, d'une chambre d'agriculture, ou du rapprochement des prisonniers politiques; des maires, des conseils municipaux, représentants du peuple choisis au suffrage universel, humiliés publiquement de voir leur représentativité démocratique ainsi bafouée.

Quelle égalité devant la loi pour la langue basque (l'euskara) lorsqu'un schéma d'aménagement linguistique est adopté, qu'une majorité toujours plus importante de la population demande l'enseignement généralisé de l'euskara et la bilinguisation du service public, mais qu'un obscur texte de loi a finalement imposé que la seule langue de la république se devait d'être le français.

Pour Marianne qui, à sa naissance, représentait une république multilingue, l'instruction publique, l'armée ou les amendements de constitution ont enterré l'égalité culturelle. Elle a vu les gouvernements rester sourds face à toutes ces revendications, mettre une majorité en minorité.


Marianne outragée; Marianne brisée;
Marianne martyrisée; mais Marianne libérée!

Libérée par des citoyens ayant entendu son appel au secours, ne pouvant rester de marbre à la voir figée de grès ou de force sur son socle. Car nous, membres du FDLM, sommes issus de la même tradition républicaine, dans sa dimension universaliste et progressiste, loin de la conception réductrice et cocardière qui est censée la représenter aujourd'hui.
Et Marianne est des nôtres. (…). "

 


Ces actions
symboliques et spectaculaires
s'inscrivent dans une stratégie d'action non-violente avec pour objectif de développer un mouvement de masse de désobéissance civile afin de faire aboutir nos revendications et de faire respecter les véritables principes d'une démocratie.

Ce mouvement de masse nous sommes petit à petit en train de le construire, ce qui nous permet de commencer à établir un rapport de force avec nos adversaires.

La campagne que nous menons depuis janvier 2001 pour le développement de l'usage de la langue basque à la SNCF est à ce titre intéressante, car elle illustre bien les différentes étapes nécessaires à la construction d'un rapport de force.

voir dossier SNCF